Corinne Azan

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A l’écoute de ses émotions
A l’écoute de son corps

« Nous ne sommes pas seulement corps, ou seulement esprit ; nous sommes corps et esprit tout ensemble ».

Georges Sand

« J’en ai plein le dos… », « Je suis tellement fatigué de … », « J’ai tellement les nerfs que j’en ai des brûlures d’estomac, des remontées acides … », « Sois fort », « Fais pas ta chochotte ! »… Combien de petites phrases et injonctions entendons-nous ou prononçons-nous dans une même journée qui parlent de notre corps, qui parlent de notre état d’esprit, qui parlent de nos émotions ? Combien de messages nous sont transmis par nos émotions et notre corps ? Sommes-nous capables d’ « entendre » vraiment ces messages, « entendre » au sens d’écouter et comprendre ?

L’émotion a pour racine étymologique latine « Ex-movere » qui signifie faire mouvement vers l’extérieur.

Les émotions de base sont la joie, la colère, la tristesse, la peur, auxquelles il faut ajouter la surprise et le dégoût, ainsi que les émotions de socialisation de la honte et de la culpabilité.

Ces émotions, qui se caractérisent souvent par des manifestations physiques, nous envoient des messages nous invitant à nous mettre en mouvement par rapport aux évènements importants de notre vie.

Nous tendons à occulter certains messages liés à des émotions surtout désagréables » comme la tristesse ou la colère.

De nombreuses raisons peuvent expliquer cette mise sous silence de nos émotions et signaux envoyés par le corps. Parmi ces raisons, nous pouvons retenir :

  • Notre esprit cartésien français : c’est la raison qui gouverne le corps et l’esprit, envers et contre-tout.
  • Les émotions sont par essence suspectes. Lorsque les émotions sont exprimées « trop fortement », elles seraient l’apanage de personnes « hypersensibles », donc hyper-vulnérables et dans notre société parfois agressive, nous souhaitons nous protéger contre ce qui pourrait être interprété comme une fragilité.
  • Répondre à notre message contraignant « Sois fort ». (Pour rappel, un « message contraignant » est une injonction intégrée dans notre petite enfance et que nous respectons dans l’espoir d’être aimé et socialement intégré).Une personne forte se doit de ne pas s’écouter lorsqu’elle se sent fatiguée, accablée, triste. Elle se doit de dépasser les difficultés courantes pour atteindre son objectif. Dans cette configuration, les signaux du corps, les états d’âme ne disposent d’aucune place pour s’exprimer. Pour une personne souhaitant répondre à son message « Sois fort », écouter corps et émotions reviendrait à se regarder le nombril et donc à faire du sur-place.
Toutes ces raisons peuvent être en partie fondées si nous les remettons dans leur contexte à leur juste point d’équilibre.

Les émotions et manifestations physiques sont des messagers

La vraie difficulté n’est pas d’avoir des émotions agréables ou désagréables mais d’être submergés par des émotions qui nous empêcheraient d’agir sereinement. Il s’agit d’être dans un juste équilibre entre l’écoute de soi-même et notre volonté d’agir. Ecouter notre corps et nos émotions n‘est pas rechercher la moindre manifestation qui indiquerait un problème de santé (cas de l’hypocondrie).  A l’inverse, un message corporel ou émotionnel qui n’est pas écouté tendra à se répéter de plus en plus fort et de plus en plus violemment.

Michel Odoul, fondateur de l’Institut Français de Shiatsu, et auteur du célèbre livre « Dis-moi où tu as mal, je te dirai pourquoi » paru en 1994, va même plus loin encore dans l’écoute des signaux corporels. Selon lui, les relations entre le corps et l’esprit sont très fortes et la survenance d’une douleur a toujours une signification précise. La zone du corps douloureuse envoie un message particulier, symbolique qu’il faut savoir entendre au risque d’une aggravation des symptômes. De même, le moment de sa vie au cours duquel survient la douleur a un sens particulier.

Le burnout est un bon exemple de ce qui peut se produire quand nous n’écoutons pas suffisamment nos messages corporels et émotionnels. Le psychiatre américain Herbert Freudenberger décrit pour la première fois en 1974 ce syndrome d’épuisement professionnel (« Burn-Out Syndrome ») : il s’agit d’une perte de motivation pour son travail, venant surtout d’une personne impliquée dans sa vie professionnelle et qui ne recueille pas les résultats attendus au regard de son implication. Des manifestations physiques de fatigue extrême (douleurs musculaires, moindre résistance aux infections, blocage du dos, migraines …) et de symptômes comportementaux sont alors constatés. La colère, l’irritation, la difficulté à s’adapter à une nouvelle situation, la susceptibilité, le cynisme, parfois également la difficulté à exprimer ses émotions apparaissent.

Dans cet exemple du burnout, c’est à la fois l’émotion de la colère qui n’a pas été entendue et les signaux physiques de plus en plus douloureux du corps qui se conjuguent ensemble pour dire « Stop, impossible de continuer ainsi ! ». Le burnout peut envoyer comme message un besoin de respect en tant que personne dans ses valeurs et dans son être. La charge à supporter est devenue trop lourde pour la personne : besoin d’espace et de repos, besoin de douceur, besoin de sommeil réparateur, besoin d’alléger la charge, besoin d’aide de la part  de personnes bienveillantes … Quels sont les messages transmis par ces émotions et ces ressentis physiques ? Pour quels besoins ? Comment nourrir ses besoins ? Quelles actions mener pour effectivement retrouver du calme, de la sérénité, du repos ? En fonction de la personnalité de chacun, les réponses sont multiples.
Savoir écouter avec justesse et équilibre ces messages permet de mieux se connaître, de mieux satisfaire nos besoins. Si nous ne comprenons pas le besoin non satisfait derrière ces signaux, il est nécessaire de se faire accompagner.
Ces signaux corporels et émotionnels sont une invitation à prendre soin de nous, à agir pour nous.
En conclusion, pour notre équilibre, il nous faut écouter dans une juste mesure ces messages émotionnels et corporels, les comprendre et agir en conséquence pour soi et les autres.

« Toutes nos émotions sont des signaux de nos besoins. Les émotions positives nous disent que nos besoins sont satisfaits ou en voie de satisfaction. Les émotions négatives qu’ils ne sont pas satisfaits. Ecoutons et réfléchissons pour agir, à ce qui se passe avec nos besoins fondamentaux. »


Bouddha²

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